LES ESTIVES D'ARGUT
Mardi 23 janvier 2024
Les estives d’Argut, point haut 1250m.
8,2km A/R D+520m.
9h30 : grand ciel bleu et douceur ce matin près de l'église d'Argut-dessous, 750m, un village ensoleillé perché au dessus de Fos, près de la frontière espagnole.
Une charretière, assez pentue ma fois, rallie Argut-Dessus, 900m, par les granges de Comanies. Un beau village de montagne, peu visité car à l’écart des axes routiers, aux vieilles maisons de montagne joliment restaurées, qui mérite qu’on lui consacre quelques minutes, malgré la collection regrettable de fils électriques qui s’entrecroisent sur l’église, massive et crépie, sans charme aucun... Mais le village lui-même n'en manque pas : ruelles pentues, fours à pain en saillie sur les façades, balcons de bois, vieux murs, escaliers et perrons de pierre où cascadent les fleurs en été… Et une bibliothèque municipale, à l'origine scolaire, fondée en 1880 et aujourd'hui en accès ouvert !
En haut du village, une piste herbeuse et très douce s’en va à flanc vers la croix d’Artigues, 969m, plantée dans un virage en épingle : un belvédère paisible sur la vallée qui file vers le Pont du Roy, les deux villages d'Argut et les sommets frontaliers trop peu enneigés pour la saison...
Le temps d'une pause et la charretière qui devient alors pierreuse et plus pentue, dessert de belles granges d'estives rénovées.
Voici en haut celle de Cailladaous, au carrefour de Bernech, 1074m.
A gauche toute : les uns, partis à un train de sénateurs (c'est à dire plus lentement, comme le dit La Fontaine dans "Le lièvre et la tortue" ! ) choisissent de s'arrêter un peu plus haut, à la très belle grange de Pracéderrès, 1100m, point de rendez-vous pour le pique-nique : portail ouvert, pré-jardin, fontaine, vue sur l'Espagne et le pico Monludo, 2510m.
Les autres continuent pour effectuer une boucle en allant tutoyer une piste forestière partie de la montée vers le col de Menté, point haut 1250m, avant de rejoindre les sénateurs à midi pour partager le pique-nique et redescendre ensuite tous ensemble. Parking vers 14h30.
Et un peu d'histoire pour terminer !
Fos a été de tout temps un lieu d’échange vital pour le Val d’Aran coupé du reste de L’Espagne jusqu’à l’ouverture du tunnel de Vielha en 1950. L’aranais, c’est d’ailleurs le gascon parlé en Comminges. Une petite ligne de tramway reliait Marignac au Pont-du-Roy de 1914 à 1953, et Fos a été le point de passage des réfugiés de la guerre d'Espagne, avant d'être ensuite celui des évadés de la France occupée...
Les instituteurs de l'époque tenaient les registres et dressaient l'état économique, social et sanitaire des lieux : 107 maisons pour 393 habitants à Argut en 1881, 200 en 1900, 22 aujourd'hui... Ici, rapporte l'instituteur en 1886, "on a exploité des mines de plomb, d'argent, de blende, de cuivre et de phosphate, mais toujours les compagnies ont dû les abandonner parce que le rendement ne payait pas les frais... L'extraction et le façonnage sont une grande ressource pour le village, et le traînage à Saint-Béat ou à Fos est encore l'occasion de gagner quelques sous... Une magnifique bâtisse construite pour servir d’atelier aux ouvriers pour façonner l’ardoise existe encore, mais elle tombera bientôt en ruines faute d’entretien... Argut-Dessus a l’avantage de posséder une caisse des écoles qui permet de fournir aux indigents tout ce qui leur est nécessaire pour leur instruction"...
Si Argut-Dessous est une commune indépendante, Argut-Dessus, 1km à vol d’oiseau, a fusionné avec Boutx en 1974. Bizarrerie administrative ? Non, car certaines pistes du Mourtis sont situées sur la commune d’Argut-Dessus, d’autres sur celle de Couledoux, qui a aussi fusionné avec Boutx, puisque la station de ski leur est commune !
En avril 2013, le village de Fos a fêté le 500ième anniversaire du Serment du Plan d'Arem, qui a réuni les représentants des villages français et espagnols de toutes les Pyrénées Centrales au pied d’une tour encore debout près de l’actuel barrage proche du Pont du Roy. Ce jour-là, le 22 avril 1513, fut signé solennellement un traité de Lies et passeries (Liens et passages), en pleine période de guerre entre la France et l'Espagne, pour garantir les échanges économiques et la libre circulation entre toutes ces vallées, quels que soient les conflits entre les deux royaumes. Et il fut respecté à deux ou trois exceptions près ! Et invoqué durant la Guerre d'Espagne pour légitimer l'accueil des réfugiés républicains… Pour cet anniversaire fêté des deux côtés de la frontière, le vieux sentier Fos-Lès perdu dans les broussailles a été remis en état, balisé et agrémenté de bornes explicatives. Nous l'emprunterons un de nos mardis...
IMOHTEP, le scribe des mardis de L’ACCUEIL.
