CAP DE TUQUET

Mardi 31 mai 2022

Cap de Tuquet 1844m, au départ de Mont, en vallée du Louron

Dénivelé 560m ad libitum

 

 

Cap sur la vallée du Louron. Départ à 9h50 du village de Mont, 1280m, dans le col de Peyresourde. Quelques bancs de brouillard sur les sommets vont s'effilocher rapidement...

C'est un très beau village de montagne, bien rénové et entretenu, en partie sans doute grâce au legs d'un couple montois, Jacques et Geneviève-Laporte, et la place centrale porte leur nom en signe de reconnaissance. Une église d'exception aussi...

Un escalier démarre auprès d'une belle fontaine et monte jusqu'aux dernières maisons. Direction Coume Longue. Une piste s'en va ensuite jusqu'à la petite chapelle de Bayet toute proche, à laquelle est attachée une légende insolite, peu conforme à la soumission des fidèles face à la volonté divine : lors d’une grande sécheresse en 1668, une villageoise en colère envoya la statue de la Vierge sourde aux prières prendre un bain forcé dans le ruisseau et un orage violent éclata aussitôt ! Traitement efficace de la surdité divine, applicable aux dirigeants de ce monde insensibles aux misères de leurs peuples ?...

Quelques granges peu après et c'est un large sentier plat qui s'en va dans le vallon de Coume Longue en suivant le ruisseau qui cabriole gaiement dans une profusion de genêts en fleurs. Au fond, droit devant, se dresse bientôt une montagne pointue, le Cap de Tuquet. Il va bien falloir que le sentier se décide à monter ! Et soudain, quand le vallon s'élargit, le voilà qui prend le flanc et grimpe vigoureusement pour avaler d'un seul coup, pour vous hisser sur un replat de la crête, 1620m, entre le Cap de Bosc Grand et le Cap de Tuquet vers 11h.

Certains choisissent de monter en aller-retour jusqu'au Tuquet, quelques autres préfèrent rester à Cap de Bosc Grand pour le pique-nique partagé à 12h36 face à un panorama superbe sur les sommets des Hautes-Pyrénées.

Descente à 13h35 et nous revoilà à 14h50 sur la place de Mont pour partager le pot amené par Christian.

Une belle placette au dessus de la vallée du Louron, deux fontaines, une église romane du XII°s classée Monument Historique pour ses fresques exceptionnelles du XVI°s, dont la restauration s’est achevée en 2012. Eglise ouverte, chose rare, où un commentaire enregistré mis à disposition des visiteurs pour 2€ symboliques permet de l'apprécier pleinement.

Elle offre une surface peinte impressionnante sur les murs tant extérieurs qu'intérieurs, ainsi que dans le petit oratoire du cimetière. On la dit la chapelle Sixtine des Pyrénées en raison de l'étendue de ses fresques. Réalisées en 1564, celles de la nef sont signées d'un certain Melchior Rodigis, qui oeuvra aussi à Saint-Bertrand-de-Comminges : RODI GIS*DSA NT*BER TAN /Rodigis de Saint-Bertrand et LA*FEITA MEL'CHIOR./ la peinture a été faite par Merchior.

Le retable baroque restauré a retrouvé sa place dans le choeur. Il a été réalisé au XVII°s par l'atelier Ferrère installé à Asté près de Bagnères-de-Bigorre, qui fut pendant un siècle et demi le centre artistique du Baroque dans les Pyrénées Occidentales et Centrales grâce à une dynastie de sculpteurs, la famille Ferrère. De 1647 jusque vers 1800, quatre générations se sont succédé dans un atelier prospère et leurs oeuvres attirent aujourd'hui de nombreux visiteurs dans les églises pyrénéennes. Les retables et tabernacles des Ferrère forment un riche patrimoine religieux dans 59 églises, Mont, Tarbes, Esparros, Ibos, Bourisp, Campan, Vielle-Adour, Guchen, Bordères-Louron, Ancizan, Beaudéan, pour ne citer qu'elles...

Ce sont les échanges avec l'Espagne enrichie par les Conquistadors qui enrichissent à leur tour les vallées françaises : les églises romanes sont agrandies et embellies. Dès le Moyen Âge en effet se pratiquaient échanges et relations avec les vallées aragonaises de Bielsa, Gistain et Vio car les habitants se livraient ensemble à la transhumance et à la contrebande grâce aux cols de montagne. Au XIes, une bataille aurait eu lieu ici entre les Maures et des chevaliers aragonais venus soutenir les habitants de la vallée. En mémoire de deux chevaliers aragonais tués près d'ici, Calixte et Mercurial, deux chapelles ont été érigées : Saint-Mercurial à Vielle-Louron et Saint-Calixte à Cazaux-Fréchet tout près d'ici[. Cette dernière, hélas fermée, est classée au titre des monuments historiques depuis 1944 et abrite aussi un retable Ferrère et des peintures murales du même Melchior Rodigis. Abîmées mais de grande valeur, elles ont été reconnues en avril 2018 "patrimoine en danger" par la mission Stéphane Bern.

Et voilà une belle journée, montagnarde et patrimoniale !

Imohtep, le scribe des mardis de L'ACCUEIL