LAC D'ÔO

Mardi 8 octobre 2024

Lac d’Oô 1504m,   Dénivelé +410/+560m  

               Soleil et douceur ce mardi. Direction le Lac d'Oô pour clôturer l'été !  Niché à 1507 m d’altitude, c'est un lac glaciaire naturel, alimenté par la Neste d’Oô descendue du lac du Port d'Oô, 2664m et de nombreux ruisseaux, un lac devenu artificiel en 1921 avec la construction du barrage. Surplombé par de nombreux sommets mythiques comme les Spijeoles (3065 m) ou le Grand Quayrat (3060 m), c'est un lac donné à tort comme une petite balade familiale, d'où les touristes et curistes en sandalettes qui attaquent cette "promenade" à 15h...

               Départ à 9h20 du parking des Granges d’Astau, 1130m, sur le GR10 qui suit d'abord une piste tranquille  pour remonter en douceur le Val d’Astau, où court la Neste d’Oo qui, après avoir traversé le lac d’Oo, rejoint plus loin la Neste d'Oueil  pour former l'One qui se jettera  dans la Pique à Luchon. C’est l’ancien sentier tracé à la fin de Guerre 14-18, lors de la construction des barrages du lac d’Oo et du Portillon à 2570m d’altitude, dont subsistent encore quelques pavés. Sur la droite, une longue écharpe blanche coupe le flanc boisé, la Chevelure de Madeleine : d’une pauvre bergère dévorée autrefois par les loups avec ses moutons, ne reste que la belle chevelure, qui ruisselle en cascade…  Peu après, un morceau de falaise d’un jaune doré par le soleil attire le regard : oui, oui, c’est bien du soufre !

            Une bonne demi-heure après le départ, la piste devient sente qui se décide tout d’un coup à monter en lacets bien sentis, près de deux cents mètres  de dénivelé plutôt raide, caillouteux et humide, avant de se calmer un peu pour  remonter sous le verrou du lac d’Oo.  En bas, minuscule, le parking des Granges d’Astau, et au loin, au dessus du village de Cathervielle dans le Peyresourde, la Coume de Herrère reconnaissable à deux bois de sapins qui dessinent comme deux poumons sur les pelouses de la Montagne d’Espiau.

            Et aujourd'hui, l'eau descend même entre les cailloux de la sente (une pensée pour les touristes trompés par le départ tranquille dans le Val d'Astau...) ! Explication d'EDF : le lac d'Oô était plein à ras bord dès vendredi soir et a débordé suite aux pluies du week-end en déversant un torrent de boue jusqu'au village de 0ô dans la vallée, où l'élevage de truites a d'ailleurs subi des pertes importantes.

            A droite près du verrou, l’arche d’un joli pont de pierre permet de passer la Neste d'Oô pour rejoindre la rive et l’auberge refuge du lac d’Oo, 1510m. Il est 11h10. Les uns choisissent de lézarder les pieds dans l'eau, face à la cascade bouillonnante, 275 m de chute ; les autres poursuivent plus haut sur le GR10 qui grimpe au lac d’Espingo, sente toujours raide et caillouteuse, un A/R de150m de dénivelé supplémentaire pour surplomber le lac aux infinies nuances de vert et de bleu.

             Pique-nique partagé à 12h30.  Grand Quayrat saupoudré de neige sur le bleu du ciel et cascade énorme, il est bien beau aujourd’hui, le lac d’Oo !

             Comment imaginer dans ce paysage sauvage qu'une galerie souterraine de 11 km de long amène ses eaux à la centrale hydroélectrique d'Oô à la sortie de Luchon. Mise en service en 1921, elle fait partie d'un aménagement global récupérant par torrents et conduites forcées les eaux de montagne de trois vallées, 10 lacs et 5 centrales (hauteur totale de chute de 802 m). Ce barrage permet l'alimentation d'une ville d'environ 30000 habitants et contribue à satisfaire les pics de consommation nationale en électricité.

             Descente à 14h, parking à 15h30 et pot sur place à l'Auberge d'Astau, près d'une jolie petite chapelle.  

               Et quelques mots pour finir sur cette chapelle dédiée à Saint-Aventin, dont les fresques furent peintes en 1952 par Nicolas Greschny, un artiste d’origine russe qui a fui bolchevisme puis nazisme et fini par trouver asile en 1949 près d’Albi, où les autorités diocésaines donnèrent églises et chapelles du Tarn à décorer à ce croyant orthodoxe...  Jusqu’à sa mort en 1985, outre des icônes, il a réalisé plus de 100 fresques d’inspiration byzantine, dont 75  dans le sud-ouest notamment en Comminges (où l’avait invité l’abbé Bories, curé de Saint-Gaudens, originaire d’Albi) : Miramont, Le Cuing, Gouaux-de-Larboust, Encausse,  Loudet, Ponlat, Saint-Plancard, Ferrère, Mauléon…

              Saint Aventin, martyr du VIII°s né en vallée du Larboust, s’était retiré au lieu-dit les granges d'Astau, quand il vit un jour un ours venir à lui, une grosse épine plantée dans la patte. Aventin l’enleva, et l'ours s'en retourna. La légende allait se mettre en place… Il évangélisait la région quand les Sarrasins arrivèrent. Pourchassé, capturé et enfermé à la tour de Castel-Blancat, à la jonction des vallées d'Oueil et du Larboust, il s’élança dans le vide, traversa la vallée et se posa sur un rocher qui conserva, dit-on, l'empreinte de son pied, endroit marqué aujourd’hui par une petite chapelle, la Chapelle du Miracle. Et il continua son travail d'évangélisateur. Bientôt repris, il fut cette fois immédiatement décapité. On le vit alors ramasser sa tête et marcher jusqu'à l'endroit où il tomba, définitivement mort. Les fidèles l'enterrèrent sur place. Des siècles plus tard, un vacher creusa à l’endroit où un taureau grattait avec insistance ; il entendit la voix d'un ange : « Ici repose le bienheureux Aventin ». Un essaim d'abeilles jaillit alors du sol, que l'évêque de Comminges vint mettre en fuite en lisant aux enragées une missive papale… On put alors exhumer le corps qui dégageait une odeur merveilleuse. Comme les habitants des deux vallées se le disputaient, il fut placé sur un traîneau tiré par deux vaches, une de chaque vallée, qu'on laissa aller librement. L'attelage prit la route du Larboust, et là où il s'arrêta, Aventin fut enseveli : une église fut édifiée sur son tombeau, au village actuel de Saint-Aventin.  

IMOHTEP, le scribe des mardis de L’ACCUEIL.

Date de dernière mise à jour : 12/10/2024